Le financement du service universel des télécommunications

L’arrêt du Conseil d’Etat du 18 juin 2003 « Société Tiscali Télécom »

La Cour de justice des communautés européennes, par un arrêt en date du 6 décembre 2001, a jugé certaines des dispositions du code des postes et télécommunications français relatives au financement du service universel des télécommunications incompatibles avec le droit communautaire applicable. Cette circonstance faisait obstacle à l’application de ces dispositions par les autorités nationales. Or se fondant sur l’urgence et la nécessité d’assurer la continuité du fonctionnement du service universel des télécommunications, et par conséquent, de son financement par les opérateurs de télécommunications, le ministre délégué à l’industrie avait, par un arrêté du 11 juillet 2002, déterminer le montant prévisionnel du coût net du service universel.

C’est ainsi que la société TISCALI TELECOM, opérateur de services de télécommunications, a saisi le Conseil d’Etat de deux requêtes en annulation de l’arrêté cité ci-dessus.

1°) S’agissant de la demande en décharge du montant de la contribution des opérateurs de télécommunications au titre du service universel :

Selon le Conseil d’Etat, les contributions réclamées au titre du financement du service universel des télécommunications constituent un impôt dont le contentieux, compris parmi le contentieux général des actes et des opérations de puissance publique, relève de la compétence de la juridiction administrative ; en vertu des dispositions de l’article R. 312-1 du code de justice administrative, il appartient au tribunal administratif de Paris de connaître en premier ressort du contentieux relatif à cet impôt, établi par le ministre chargé des télécommunications en application du cinquième alinéa de l’article L. 35-3-2° du code des postes et télécommunications

2°) S’agissant de la légalité de l’arrêté du 11 juillet 2002 du ministre délégué à l’industrie en tant qu’il révèle l’existence d’une décision ayant fixé les nouvelles modalités de détermination du coût net du service universel des télécommunications et détermine le montant prévisionnel de ce coût net pour l’année 2002 :

Le Conseil d’Etat approuve le choix de l’arrêté alors même que le code des postes et télécommunications prévoit que ce coût est fixé par décret pris en Conseil d’Etat et selon une procédure particulière prévue à l’article III de l’article L. 35-3 du code des postes et télécommunications.

Prenant en considération cette situation particulière liée notamment à l’urgence qui s’attachait à l’adoption de règles nouvelles destinées à tirer toutes les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice des communautés européennes et à assurer la continuité du financement et du fonctionnement du service universel, le Conseil tend à considérer qu’il peut faire entorse aux procédures internes prévues par la loi en vue de respecter l’arrêt de la CJCE. L’acceptation de cette affranchissement de la loi nationale ne semble néanmoins possible ici que dans la mesure où l’obligation de transparence est respectée, permettant ainsi la fixation des modalités d’évaluation et du montant du coût net du service universel dans des conditions de clarté et de délai suffisantes pour permettre aux opérateurs participant au financement du service universel de prévoir le montant des contributions qui leur seraient réclamées et de s’en acquitter dans les délais prescrits.

Le Conseil d’Etat annule donc l’arrêté querellé pour défaut de transparence, ledit arrêté n’ayant été ni publié, ni notifié. De plus, les opérateurs de télécommunications n’ont pas disposé d’un délai suffisant pour pouvoir déterminer le montant de la contribution prévisionnelle qui serait exigée d’eux au titre de l’année 2002 et s’en acquitter dans les délais fixés, lesquels ont d’ailleurs été abrégés.

Conseil d’État 2e sous-section, 18 juin 2003, SOCIETE TISCALI TELECOM, req. n° 250613 et n° 250608.




La couleur orange devant le juge communautaire.

De l’appréciation de la couleur comme marque (CJCE 6 mai 2003, affaire C-104/01, Libertel Groep BV contre Benelux-Merkenbureau.)

La Cour de justice des communautés européennes vient de se prononcer sur une question pour le moins inattendue mais non dépourvue de conséquences juridiques, dans la mesure où une marque enregistrée confère un monopole d’exploitation à son titulaire, qui fait usage exclusif des signes qui la constituent.

Saisi par le juge de cassation des pays par voie de recours préjudiciel en interprétation de l’article 3 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, la CJCE a été invitée à répondre notamment à la question de savoir si une couleur en elle-même, sans forme ni contour, peut constituer un signe susceptible de représentation graphique propre à distinguer les produits et les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. Dans l’affirmative, la Cour devait préciser les conditions dans lesquelles une telle marque pourrait être retenue.

Le litige est né suite au refus de l’autorité compétente hollandaise d’enregistrer la couleur orange comme marque pour les matériels de télécommunications, services de télécommunications ainsi que de gestion matérielle, financière et technique des moyens de télécommunications.

A l’interrogation principale, l’avocat général M. Philippe LEGER, dans des conclusions qui ne manquent pas d’argumentation, a proposé à la Cour de répondre par la négative et de juger que « l’article 2 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988 […] doit être interprété en ce sens qu’une couleur en elle-même, sans forme ni contour, ne constitue pas un signe susceptible de représentation graphique propre à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. »

Prenant le contre-pied de cette analyse, la Cour de justice des communautés européennesdit pour droit qu’une « couleur en elle-même, sans délimitation dans l’espace, est susceptible de présenter, pour certains produits et services, un caractère distinctif au sens de l’article 3, paragraphes 1, sous b), et 3, de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, à condition, notamment, qu’elle puisse faire l’objet d’une représentation graphique qui soit claire, précise, complète par elle-même, facilement accessible, intelligible, durable et objective. Cette dernière condition ne peut pas être satisfaite par la simple reproduction sur papier de la couleur en question, mais peut l’être par la désignation de cette couleur par un code d’identification internationalement reconnu. »

Elle ajoute que « pour apprécier le caractère distinctif qu’une couleur déterminée peut présenter en tant que marque, il est nécessaire de tenir compte de l’intérêt général à ne pas restreindre indûment la disponibilité des couleurs pour les autres opérateurs offrant des produits ou des services du type de ceux pour lesquels l’enregistrement est demandé. »

Ainsi « Une couleur en elle-même peut être reconnue comme ayant un caractère distinctif au sens de l’article 3, paragraphes 1, sous b), et 3, de la directive 89/104, à la condition que, par rapport à la perception du public pertinent, la marque soit apte à identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et à distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises. »

Toutefois, « le fait que l’enregistrement en tant que marque d’une couleur en elle-même soit demandé pour un nombre important de produits ou de services, ou bien qu’il le soit pour un produit ou un service spécifique ou pour un groupe spécifique de produits ou de services, est pertinent, ensemble avec les autres circonstances du cas d’espèce, tant pour apprécier le caractère distinctif de la couleur dont l’enregistrement est demandé que pour apprécier si son enregistrement contreviendrait à l’intérêt général à ne pas restreindre indûment la disponibilité des couleurs pour les autres opérateurs offrant des produits ou des services du type de ceux pour lesquels l’enregistrement est demandé. »

D’où le rôle déterminant de l’autorité compétente en matière d’enregistrement des marques, qui « doit procéder à un examen concret, en tenant compte de toutes les circonstances du cas d’espèce, et notamment de l’usage qui a été fait de la marque. »

Il s’agit en l’espèce de la première décision de la Cour de justice sur le sujet. En revanche, s’agissant de la situation française, il conviendra de relever que le Conseil d’Etat a eu à juger en 1974 que la couleur « Rouge Congo » revendiquée par une société à titre de marque présentait un caractère suffisamment distinctif pour bénéficier de la protection relative aux marques. Selon le Conseil d’Etat, « le législateur n’a pas écarté de manière absolue l’emploi d’une couleur unique, a titre de marque, dès lors qu’il s’agit d’une nuance bien déterminée qui a un caractère suffisamment distinctif pour les objets auxquels elle s’applique et que les droits résultant de cette marque ne font pas obstacle à ce que les concurrents actuels ou éventuels du propriétaire de la marque puissent colorer leurs produits selon d’autres nuances. »

En fin de compte, dans un système juridique qui favorise y compris l’appropriation du vivant à travers le brevet, conférant, comme pour la marque, un monopole d’exploitation à son titulaire, la position de la Cour, même si elle peut être contestable, n’est pas pour le moins surprenante puisqu’elle semble s’inscrire manifestement dans un courant des entreprises tendant à élargir le champs des biens susceptibles de faire l’objet d’une appropriation exclusive.




La couleur « Rouge Congo » s’invite au Conseil d’Etat.

La protection d’une couleur par le droit des marques.

Dans un arrêt du 22 février 1974, le Consei d’Etat a jugé qu’une couleur simple pouvait être protégée par le droit des marques. Selon le Conseil d’Etat, le législateur n’a pas écarté de manière absolue l’emploi d’une couleur unique, à titre de marque, dès lors qu’il s’agit d’une nuance bien déterminée qui a un caractère suffisamment distinctif pour les objets auxquels elle s’applique et que les droits résultant de cette marque ne font pas obstacle a ce que les concurrents actuels ou éventuels du propriétaire de la marque puissent colorer leurs produits selon d’autres nuances. De plus, l’usage de la couleur d’un produit à titre de marque ne saurait constituer une « atteinte à l’ordre public », au sens de la législation sur les marques.

Conseil d’Etat, 22 février 1974, N° 84629, Société Esso-Standard

M. Querenet, Rapporteur M. Gentot, Commissaire du gouvernement M. Odent, Président

ARRET

Requête de la société Esso-standard tendant à l’annulation du jugement du 27 mai 1971 par lequel le tribunal administratif de paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du 27 avril 1967 et la décision du 8 septembre 1967 prise sur le recours gracieux de la requérante par lesquelles le ministre charge de la propriété industrielle a rejeté le pot a titre de marque, de la couleur « Rouge Congo » pour désigner tous produits pétroliers, notamment huiles, graisses, essences et supercarburants, ensemble a l’annulation desdites décisions ;

Vu la loi du 31 décembre 1964 modifiée par la loi du 23 juin 1965 ; l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; le code général des impôts ;

Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1964 : « sont considérés comme marques de fabrique, de commerce ou de service, les noms patronymiques, les pseudonymes, les noms géographiques, les dénominations arbitraires ou de fantaisie, la forme caractéristique du produit ou de son conditionnement, les étiquettes, enveloppes, emblèmes, empreintes, timbres, cachets, vignettes, lisières, lisères, combinaisons ou dispositions de couleurs, dessins, reliefs, lettres, chiffres, devises et en général tous signes matériels servant à distinguer les produits, objets ou services d’une entreprise quelconque ».

Que, selon l’article 3 de la loi, tel qu’il a été modifie par la loi du 23 juin 1965 : « ne peuvent être considérés comme une marque ni en faire partie les signes dont l’utilisation serait contraire a l’ordre public ou aux bonnes mœurs… Ne peuvent, en outre, être considérées comme marques : celles qui sont constituées exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit et du service ou qui comportent des indications propres à tromper le public ; celles qui sont composées exclusivement de termes indiquant la qualité essentielle du produit ou du service ou la composition du produit » ; qu’en vertu de l’article 8, alinéa 2, de la loi, le rejet du dépôt de la marque « par application des dispositions de l’article 3 ou pour irrégularité matérielle ou défaut de payement des taxes est prononce par le ministre charge de la propriété industrielle ».

Qu’il ressort de l’ensemble de ces dispositions que le législateur, en donnant au ministre le pouvoir d’accepter ou de rejeter un dépôt de marque, ne s’est pas borne à lui confier le soin de contrôler la régularité matérielle du dépôt et la perception des taxes mais l’a nécessairement charge d’apprécier, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir et sous réserve des droits éventuels des tiers, si une marque répond a l’ensemble des conditions posées par les articles 1 et 3 de la loi pour faire valablement l’objet d’un dépôt ;

Considérant que, l’article 12 de la loi du 31 décembre 1964, lequel dispose « la nullité du dépôt ou la déchéance des droits du déposant est prononcée par les tribunaux de grande instance », ne trouve à s’appliquer que dans le cas de marques effectivement enregistrées ; que ses dispositions n’ont ni pour objet, ni pour effet de faire obstacle a l’appréciation par l’administration de la validité de la marque au regard des dispositions de l’article 1er de la loi du 31 décembre 1964 ;

Considérant que, si l’article 1er de la loi reconnaît expressément le caractère de marques aux « combinaisons ou dispositions de couleurs », l’énumération donnée par cet article des signes susceptibles de constituer une marque n’est pas limitative ; que le législateur n’a pas écarté de manière absolue l’emploi d’une couleur unique, à titre de marque, dès lors qu’il s’agit d’une nuance bien déterminée qui a un caractère suffisamment distinctif pour les objets auxquels elle s’applique et que les droits résultant de cette marque ne font pas obstacle a ce que les concurrents actuels ou éventuels du propriétaire de la marque puissent colorer leurs produits selon d’autres nuances ; que la couleur « Rouge Congo » définie au dépôt litigieux en vue de « désigner tous produits pétroliers, notamment huiles, graisses, essences et supercarburants » répond à cette condition ; que la couleur revendiquée par la société requérante à titre de marque présente, dans ces conditions, un caractère suffisamment distinctif pour bénéficier de la protection instituée par la loi du 31 décembre 1964 ;

Considérant que l’usage de la couleur d’un produit à titre de marque ne saurait constituer une « atteinte à l’ordre public », au sens de l’alinéa 1er de l’article 3 de la loi du 31 décembre 1964 ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la requérante est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaque, le tribunal administratif a refuse d’annuler les décisions par lesquelles le ministre charge de la propriété industrielle a rejeté le dépôt de la couleur « Rouge Congo » à titre de marque pour désigner tous produits pétroliers ;

Considérant que, dans les circonstances de l’affaire, il y a lieu de mettre les dépens de première instance a la charge de l’Etat ; …

[Annulation ; dépens mis à la charge de l’Etat].




Le Conseil supérieur de l’audiovisuel et la télévision numérique de terre.

Le Conseil d’Etat rejette pour irrecevabilité (décision ne pouvant faire grief) la requête en annulation de l’association AFORM et des opérateurs du câble contre la décision n° 2001.387 du 24 juillet 2001 du Conseil supérieur de l’audiovisuel relative à un appel aux candidatures pour l’édition de services de télévision à vocation nationale diffusés par voie numérique hertzienne. Selon le Conseil d’Etat, les dispositions du premier chapitre de cette décision qui commente le cadre général dans lequel la TNT sera introduite en France, sont dénuées de tout caractère impératif. Par ailleurs, la décision (chapitres II et III) lançant un appel à candidatures pour l’édition des services de TNT, en précisant les étapes constitutives de cette procédure, le contenu du dossier à remettre par les candidats, les modalités d’examen des candidatures et notamment les critères de sélection qui seront retenus ainsi que les dispositions liées à l’attribution des fréquences, présente le caractère d’une mesure préparatoire.

Conseil d’Etat, 19 mars 2003, n° 237513, Association française des multiservices AFORM et autres, (Section du contentieux, 5ème et 7ème sous-sections réunies)

M. Lambron, Rapporteur

M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement

Sur le rapport de la 5ème sous-section de la Section du contentieux

Vu la requête, le mémoire ampliatif et les observations complémentaires, enregistrés les 22 août, 24 septembre et 19 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour l’ASSOCIATION FRANÇAISE DES OPERATEURS DE RESEAUX MULTISERVICES (AFORM), dont le siège est situé 17, rue Hamelin à Paris (75016) ; la SOCIETE EST VIDEO COMMUNICATION, dont le siège est 26, boulevard du Président Wilson à Strasbourg (67000) ; la SOCIETE FRANCE TELECOM CABLE, dont le siège est 40, rue Gabriel Crié à Malakoff (92249) ; la SOCIETE NC NUMERICABLE, dont le siège est 12/16, rue Guynemer à Issy-les-Moulineaux (92445) ; la SOCIETE LYONNAISE COMMUNICATIONS (NOOS), dont le siège est 20, place des Vins de France à Paris (75012) ; la SOCIETE NTL FRANCE, dont le siège est 22, quai Galliéni à Suresnes (92158) ; la SOCIETE DE CONCEPTION ET DE GESTION DE SERVICES (SCGS), dont le siège est 72-76, avenue Raymond Poincaré à Dijon (21078) ; la SOCIETE UPC FRANCE, dont le siège est 10, rue Albert Einstein à Champs-sur-Marne (77420) ; la SOCIETE VALVISION, dont le siège est 8 A, chemin de Palente à Besançon (25000) ; les requérantes demandent au Conseil d’Etat d’annuler la décision en date du 24 juillet 2001 du Conseil supérieur de l’audiovisuel relative à un appel aux candidatures pour l’édition de services de télévision à vocation nationale diffusés par voie numérique hertzienne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité du 27 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne devenue la Communauté européenne ;

Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 ;

Vu la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Lambron, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l’ASSOCIATION FRANÇAISE DES OPERATEURS DE RESEAUX MULTISERVICES AFORM et autres,
– les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel :

Considérant que la décision n° 2001.387 du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 24 juillet 2001 relative à un appel à candidatures pour l’édition de services de télévision à vocation nationale diffusés par voie numérique hertzienne commente, dans son chapitre premier, le cadre général dans lequel la télévision numérique de terre sera introduite en France ; que les dispositions de ce chapitre, qui sont dénuées de tout caractère impératif, ne sont pas susceptibles d’être déférées au juge de l’excès de pouvoir ;

Considérant que la même décision, dans ses chapitres II et III, lance l’appel aux candidatures pour l’édition des services mentionnés plus haut, en précisant les étapes constitutives de cette procédure, le contenu du dossier à remettre par les candidats, les modalités d’examen des candidatures et notamment les critères de sélection qui seront retenus ainsi que les dispositions liées à l’attribution des fréquences ; qu’elle présente dans cette mesure le caractère d’une mesure préparatoire qui n’est pas susceptible d’être déférée au juge de l’excès de pouvoir ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le Conseil supérieur de l’audiovisuel est fondé à soutenir que la requête tendant à l’annulation de la décision du 24 juillet 2001 est irrecevable ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l’ASSOCIATION FRANÇAISE DES OPERATEURS DE RESEAUX MULTISERVICES et autres est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION FRANÇAISE DES OPERATEURS DE RESEAUX MULTISERVICES (AFORM), à la SOCIETE EST VIDEO COMMUNICATION, à la SOCIETE FRANCE TELECOM CABLE, à la SOCIETE NC NUMERICABLE, à la SOCIETE LYONNAISE COMMUNICATIONS (NOOS), à la SOCIETE NTL FRANCE, à la SOCIETE DE CONCEPTION ET DE GESTION DE SERVICES (SCGS), à la SOCIETE UPC FRANCE, à la SOCIETE VALVISION, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.




Critère de professionnalisme et attribution des fréquences audiovisuelles

Le Conseil d’Etat 13 décembre 2002 SOCIETE RADIO MONTE-CARLO, Req. N° 221827

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 7 juin 2000 et 29 septembre 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO (RMC) demandant au Conseil d’Etat, d’une part, d’annuler pour excès de pouvoir la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 15 décembre 1999 en tant qu’elle rejette sa candidature pour l’exploitation de services de radiodiffusion sonore par voie hertzienne terrestre dans la zone de Roanne, d’autre part, d’enjoindre au Conseil supérieur de l’audiovisuel de lui attribuer une fréquence dans la zone de Roanne ou à défaut dans la région Rhône-Alpes ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Logak, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO,

– les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu’aux termes de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986, le Conseil supérieur de l’audiovisuel « accorde les autorisations en appréciant l’intérêt de chaque projet pour le public, au regard des impératifs prioritaires que sont la sauvegarde du pluralisme des courants d’expression socio-culturels, la diversification des opérateurs et la nécessité d’éviter les abus de position dominante ainsi que les pratiques entravant le libre exercice de la concurrence./ Il tient également compte : 1 De l’expérience acquise par le candidat dans les activités de communication (…) » ;

Considérant que pour rejeter la candidature de la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO dans la zone de Roanne et lui préférer la candidature de la société Radio Nostalgie, le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’est fondé sur l’unique motif tiré de ce que « eu égard au critère de l’expérience acquise dans les activités de communication », ce dernier opérateur présente un « professionnalisme (…) supérieur à celui dont peut se prévaloir RMC » ; que si le critère ainsi tiré du 1 de l’article 29 de la loi du 30 septembre 1986 peut, sans erreur de droit, être pris en considération par le Conseil supérieur de l’audiovisuel pour apprécier les mérites respectifs de candidatures concurrentes, il ne ressort pas des pièces du dossier que la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO présente des garanties de professionnalisme moindres que la radio retenue ; que les circonstances invoquées par le Conseil supérieur de l’audiovisuel devant le Conseil d’Etat, selon lesquelles « la ligne éditoriale de RMC a connu un glissement (…) au point de se rapprocher d’un service thématique à dominante musicale » et qu’il en serait résulté une relative désaffection du public ne sont pas davantage de nature à établir le bien fondé du motif sur lequel le Conseil supérieur de l’audiovisuel a fondé sa décision ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO est fondée à demander l’annulation de la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 15 décembre 1999 en tant qu’elle rejette sa candidature dans la zone de Roanne ;

Sur les conclusions tendant à ce que le Conseil d’Etat ordonne au Conseil supérieur de l’audiovisuel d’attribuer une fréquence à la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO dans la zone de Roanne ou, à défaut d’une fréquence vacante, dans la région Rhône-Alpes :

Considérant que l’annulation de la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 15 décembre 1999 rejetant la candidature de la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO dans la zone de Roanne n’implique pas nécessairement que le Conseil supérieur de l’audiovisuel attribue une fréquence à la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO dans cette zone mais seulement qu’il réexamine, au regard de l’ensemble des critères fixés par l’article 29 précité de la loi du 30 septembre 1986, la candidature que cette société a présentée ; qu’ainsi les conclusions susanalysées ne peuvent être accueillies ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel en date du 15 décembre 1999 est annulée en tant qu’elle rejette la candidature de la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO dans la zone de Roanne.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE RADIO MONTE-CARLO, au Conseil supérieur de l’audiovisuel, au Premier ministre et au ministre de la culture et de la communication.